La route face à moi est libre, un petit vent doux et léger pénètre dans l’habitacle de mon véhicule et me caresse le bras. Sur ma droite, le soleil quelque peu réticent au réveil fait chatoyer le pampre des vignes ; la chaleur à venir n’a pas encore happé la rosée bienfaisante de cette fin d’été. D’une allure sereine, je roule vers la ville. Dans mon rétroviseur, soudain une tache noire, qui grandit, qui grandit jusqu’à déborder du petit miroir. Une voiture, enragée, me rejoint en toute hâte et semble à présent soudée à ma malle arrière. D’un autre coup d’œil, je parviens à reconnaître la marque des lunettes de la conductrice. Car il s’agit d’une femme, d’un certain âge, qui se désespère du peu d’entrain que je manifeste à rejoindre l’enfer urbain. Comme elle ne se décide pas à doubler, et que je ne souhaite pas me presser, elle multiplie les signes d’exaspération : elle ralentit, s’éloigne quelque peu, accélère de nouveau, tape sur son volant, se déporte sur sa gauche… de toute évidence, je suis devenu une gêne, un obstacle, un ennemi mortel, je la ralentis, je la prive de son droit à l’accélération… […]